Sand, elle est chiante. Sandrine Goeyvaerts de son vrai nom, elle anime à elle seule – et pas de main morte – son blog La Pinardothèque (ou thek, c’est selon…) et c’est elle qui nous a demandé de tout péter pour cet énième VdV. Je crois la connaître : elle voudrait du beau bouchon de liège et je n’ai qu’une vulgaire capsule à lui proposer. Ah, les filles d’aujourd’hui…
Elle veut qu’ça pète à tous les étages et je n’ai ni Champagne ni Blanquette à la cave. Et point de crémant à l’horizon ! Elle veut du peinard, du tranquille, du sage alors que je pense Révolution et que je l’attends de pied ferme ce mouvement de rue. D’ailleurs, au départ, je ne souhaitais pas évoquer les bulles. Pour péter un plomb on n’a nul besoin de gaz. Alors, tout bien réfléchi, je me suis dit qu’une petite provoque de vieux bourgeois déconfit ne ferait de mal à personne. Comme évoquer le pet de nonne ou le pet de lapin associé à un verre de grand liquoreux, par exemple. Disserter sur le noble pet, en somme. Âmes sensibles, s’abstenir…
Voyant que tout le monde fonce dans le registre de la « moustille » et de la turbulence, je me sens obliger de changer mon fusil d’épaule. Et de ressortir mon vieux motto de parvenu gauchiste : « toujours péter librement dans un lit de dentelle et de soie avant de s’endormir ». Alors, puisque de toute façon je sens bien que ça va péter dans tous les sens, de tous les côtés et jusque dans tous les coins, vu que je ne suis pas du genre à tirer le premier, j’en reviens à un bon vieux magnum capsulé, le dernier qui me reste. Un OVNI, quelque chose qui ne vient ni de Champagne, ni d’Alsace, mais du bon, du brave Sud-Ouest, de Fronton même, autant dire du pays de cocagne. Roc’Ambulle, mixture de Mauzac et de Négrette vendue 13 € uniquement en magnum au Domaine le Roc, est un vin de France qui ne titre que 9,5 degrés. Un vin qui pétille et qui mousse. Un vin de fillettes pour certains frimeurs du goulot.
Oui, je sais que depuis que je l’ai découvert à Vinisud, là où les blogueurs et les journalistes ne restent pas plus de 24 heures, pour cause de séjour limité, généreusement offert par les autorités de tutelle, j’ai une fâcheuse tendance à vous en rabâcher les oreilles. Depuis, j’en ai acheté un carton, et pourtant je sais que ce n’est pas le genre de truc qui attire les foules initiées. Tant mieux ! D’ailleurs, les gens boivent ça d’une traite comme si c’était du cidre ou de la bière. C’est ma faute puisque c’est moi qui leur ai dit ça par simple provocation. « Buvez, c’est de la bière de vin ! » Ils ne remarquent même pas le gros contenant, le côté festif du magnum.
Passez-moi le décapsuleur.
Attention, ça risque de péter !
Moi, j’y trouve de la finesse, du fruit, de la fraise écrasée, de la gaieté, du copinage, de la légèreté, de la soif et même une pointe d’amour coquin. Un petit clin d’œil du genre : « dis donc coco, viens donc te coller à moi, ne crains rien, viens… ». Certes, pas de quoi en faire des tonnes, mais de quoi ne pas s’ennuyer non plus alors que tout le monde autour de vous s’agite en poncifs et ne parle que grand vin, grand machin, grand cru, grand ceci, grand cela. Oui, ce magistral pet que l’on sent venir en soi en éclusant cette bouteille à mille lieues de la frime, loin d’être un simple pet mouillé, ce pet en magnum sera sûrement celui du bonheur partagé.
Après tout, c’est si beau de péter à deux !
(PS. Article paru en 2014 ici : https://pourlevin.skyrock.com/)
Michel Smith